Pourquoi as tu décidé de devenir entraineur ?

La transition s’est faite toute seule. J’ai terminé ma carrière de joueur à Solectron, où j’étais capitaine. J’étais le relais entre le groupe et l’entraîneur, Pierre Borne. J’ai dû arrêter de jouer à cause de problèmes aux genoux alors le président m’a demandé si je souhaitais coacher. J’ai dit oui sans trop hésiter. J’ai mordu à l’hameçon. J’ai ensuite profité d’un licenciement économique afin de passer tous mes diplômes d’entraineur jusqu’au DEF. Cela m’a permis de passer le BE qui demande huit semaines de cours ainsi que le DEF qui impose de partir trois fois quinze jours. C’est impossible quand on travaille de passer ce genre de diplôme.

Quels sont les entraineurs que tu as côtoyé qui ont inspiré l’entraineur que tu es aujourd’hui ?

J’en ai côtoyé beaucoup mais trois d’entre eux m’ont plus marqué. Il y a Jo Rizo, qui a été mon entraîneur en junior et senior au SAM. Il était aussi prof à la fac. Un gars passionné. J’ai aussi eu la chance de côtoyer Piero Stupar qui a marqué beaucoup de joueursde ma génération mais d’autres aussi et enfin André Menaut que j’ai côtoyé à Saint Seurin. Il a réussi à faire monter un petit village en D2 ! Il était en avance sur tout le monde. Il nous a préparé comme des machines. Psychologiquement nous étions forts.
Tous les trois m’ont beaucoup inspiré mais je ne leur arrive pas à la cheville. Ce sont des intellectuels et hommes brillants. Ils étaient des passionnés avec un pouvoir d’élocution admirable. A l’époque, ils travaillaient beaucoup sur la psychologie et le physique. Ils donnaient au groupe l’envie d’être ensemble. J’essaie de m’en inspirer. J’aurai passé des heures à les écouter. D’ailleurs les causeries d’André Menaut duraient entre trente minutes et une heure. Mais on était remonté comme des pendules après. Je me souviens d’une causerie de Piero Stupar. Nous avions été obligés de l’arrêter car c’était l’heure du match. Nous n’avions pas eu le temps de nous échauffer ! Je me rappelle de cette anecdote. On ne savait pas comment l’arrêter, c’était difficile. Il était impressionnant et pouvant faire peur à certains.

Quel est l’entraineur professionnel que tu admires et pourquoi ?

Jean-Marc Furlan qui s’est lui même beaucoup inspiré d’André Menaut. Sa philosophie de jeu me plait, sa manière de faire jouer l’équipe, sa méthodologie et son style de jeu… Joueur, il était défenseur comme moi. Nous avons joué côte à côte à Saint Seurin. Nous ne faisions pas dans la dentelle mais quand nous sommes passés de l’autre côté, le jeu est devenu notre priorité. C’est vraiment un entraîneur qui m’inspire.

« Il faut s’attacher à être juste »

Quelle est ta philosophie de jeu ?

Faire en sorte que les joueurs prennent du plaisir à jouer ensemble. C’est la partie cachée de l’iceberg. Pour la préparation athlétique, je le fais au maximum avec les ballons afin qu’ils trouvent du plaisir. Pour moi, le résultat est une chose, la manière aussi. Et j’ai tendance à faire passer la manière devant le résultat. J’ai la chance d’être dans un club où le président ne me met jamais la pression. C’est une façon de travailler sereinement. Bien entendu, j’ai toujours envie de gagner. Je ne prendrai aucun plaisir à demander aux joueurs de mettre des longs ballons devant. Je préfère quand le ballon circule. C’est ça qui me plait et j’essaie de pousser les joueurs à ça. Ce sont mes idées directrice même si ce n’est pas simple.

Causerie ou pas causerie ?

Oui mais plus les années passent et moins les joueurs y sont attentifs. Avant, c’était un moment important. Les jeunes y sont de moins en moins sensibles. Alors j’essaie d’aller à l’essentiel et de bien bosser toute la semaine. Je donne les idées directrices et deux-trois consignes. Je m’adapte. Celle qui reste importante est celle de la mi temps, là où on est dans le feu de l’action, où il faut être efficace. J’essaie de faire de plus en plus court mais j’avoue que j’ai beaucoup de mal.

Ce dont tu ne peux pas te passer quand tu es entraineur ?

Je suis assez superstitieux. Cela évolue au fil des matchs. Par exemple, si j’ai mis le tableau d’une manière, si on ne gagne pas, je change le sens. Pareil avec les détails vestimentaires. Nous avons par exemple arrêté les repas avant match car on ne gagne jamais après.

Sur le banc, tu es comment ?

J’ai la réputation d’être un entraîneur qui s’emporte un peu. C’est un peu moins important aujourd’hui avec l’âge je prends sur moi et je me calme. J’ai tendance à ne pas supporter l’injustice alors quand les décisions sont injustes, je m’emporte. Mais avec le temps je m’apaise. A l’époque, j’étais assez virulent. Mais c’est ainsi car c’est une passion. Après le match, cela ne m’empêche pas de discuter et de prendre cela à la rigolade. Nous avons tous envie de gagner.

Les soirs et lendemains de défaites, c’est comment avec Christophe Marchet ?

Je vis très mal la défaite. A La Brède il y a toujours un bon apéro après le match qui apaise un peu mais quand je suis à la maison, je cogite. Je pense au prochain match. D’ailleurs, je pense au football tous les jours. Mais je ne vis pas bien la défaite, moins bien que la plupart des joueurs qui passent vite à autre chose. Autant je me suis bien calmé sur le banc, autant là je le vis toujours aussi mal. Je n’aime pas perdre.

Et les soirs et lendemains de victoires ?

Les moments de partages sont dans les bons comme dans les mauvais moments. Mais je recherche toujours ce qui peut-être meilleur. Il est certain que la semaine passe mieux mais on se replonge aussi vite dans le prochain match.

Quels sont tes doutes et questionnements les plus réguliers ?

Mon idée est de faire passer un message, que le groupe vive bien et prenne du plaisir. Il faut faire vivre le groupe, et ce n’est pas simple. C’est une gestion humaine avec des choix à faire que l’on explique parfois, d’autre pas. Il faut s’attacher à être juste. On ne fait jamais ça de manière facile. Il faut choisir les 14 puis les 11. Parfois, je les vois faire la tête. Ce travail là n’est pas facile, mais fait partie du boulot. On se pose sans arrêt des questions sans toujours donner des réponses. Ce n’est pas toujours du goût des joueurs et c’est là qu’il faut être bon.

Que t’apporte ton activité entraîneur ?

Chaque année, je me pose la question si je continue. Mais ce sont des rapports humains. Cela fait huit ans que je suis à La Brède. Je passe beaucoup de temps avec les gens du club, que j’apprécie : les dirigeants, les joueurs… Même si cela évolue, nous passons des bons moments ensemble. Si je devais arrêter, il y aurait un grand vide. C’est du plaisir mais pour le moment, je n’envisage pas arrêter car cela m’apporte beaucoup.

Si tu n’avais pas été entraineur, qu’aurais tu aimer faire ?

Honnêtement, j’ai deux passions. Entre mon aventure à Villenave et celle du Stade Bordelais, j’ai pris une année sabbatique et je me suis initié au golf. Cela fait 10 ans que j’en fais, sans faire de la compétition. Je prends beaucoup de plaisir. Je suis dans ma bulle, tout seul. Je peux aussi y aller avec des partenaires. Cela m’apporte beaucoup et me permet d’avoir une activité physique deux fois par semaine. Je ne peux plus courir avec mes genoux. Taper dans le ballon ne me dis plus rien. Mais la petite balle oui. J’ai bien vécu la cassure lorsqu’il a fallu arrêter ma carrière de foot.

Christophe Marchet
le 8 mars 1966
Parcours entraîneur : Solectron, Villenave U15 puis équipe première, Stade Bordelais (adjoint d’Alain Rouvillois), La Brède.
Profession : Employé municipal à la mairie de Villenave d’Ornon